L’arrivée massive des technologies IP dans l’audiovisuel pose une question pratique : peut-on faire cohabiter des protocoles de contrôle d’éclairage comme le DMX over IP avec des flux vidéo IP sur un même réseau ? La réponse est oui, mais cela demande une architecture bien pensée. Décryptage.

Un réseau pour tout centraliser ?

L’audiovisuel professionnel évolue vers une convergence des flux : vidéo, audio, intercom, contrôle… et éclairage. Le tout transite désormais par des câbles réseau Ethernet, mettant fin aux kilomètres de câbles XLR, BNC ou DMX séparés.

Cela semble pratique : un seul câble pour tout. Mais peut-on réellement faire cohabiter des signaux aussi différents que des commandes DMX sur IP (Art-Net, sACN) et des flux vidéo IP (NDI, SRT, ST2110) sur une même infrastructure réseau ?

Techniquement oui. Fonctionnellement, cela dépend de votre niveau de préparation.

Des besoins réseau très différents

Pour bien comprendre les enjeux, il faut comparer les spécificités des deux types de flux :

DMX over IP (Art-Net, sACN)

  • Contrôle des projecteurs motorisés, gradateurs, effets.
  • Petits paquets de données réguliers.
  • Faible bande passante.
  • Transmission en UDP, parfois en multicast.
  • Sensible à la perte de paquets ou à la latence > 100 ms.

Vidéo sur IP (NDI, SRT, ST2110)

  • Transport de flux vidéo/audio en direct.
  • Très forte consommation de bande passante.
  • Nécessite une latence ultra-faible (souvent < 1 frame).
  • SRT en TCP ou UDP, NDI et ST2110 souvent en multicast.
  • Moins tolérant aux pertes de paquets.

Autrement dit, la vidéo est « gourmande et exigeante », alors que le DMX est « léger mais nerveux ». Sur un réseau mal configuré, les paquets DMX peuvent arriver en retard ou être perdus, causant des effets de lumière non réactifs, voire bloqués.

Oui, mais avec des règles strictes

Pour faire cohabiter ces deux mondes sur un même réseau, voici les bonnes pratiques à suivre :

1. Segmenter avec des VLANs

Chaque type de flux doit avoir son propre VLAN :

  • VLAN 10 : Vidéo IP (NDI, ST2110, SRT)
  • VLAN 20 : DMX over IP (Art-Net ou sACN)
  • VLAN 30 : Audio sur IP (Dante, AES67)

Cela permet d’isoler logiquement les paquets, même sur la même infrastructure physique.

2. Configurer les priorités QoS

Les switchs doivent prendre en charge le QoS (Quality of Service) :

  • Prioriser les flux DMX pour garantir leur réactivité.
  • Donner une haute priorité à la vidéo temps réel.
  • Réserver un minimum de bande passante pour chaque flux.

3. Gérer le multicast avec IGMP Snooping

Certains protocoles (NDI, Art-Net, ST2110) utilisent le multicast. Sans IGMP Snooping, le switch envoie tous les paquets à tous les ports, saturant rapidement le réseau.

Activez :

  • IGMP Snooping (sur tous les switchs).
  • Un IGMP Querier (souvent sur la console de mixage, le serveur ou un routeur).

4. Évitez les switchs non manageables

Même si le budget est serré, les switchs non manageables ne sont pas adaptés :

  • Pas de VLAN.
  • Pas de gestion du multicast.
  • Pas de QoS.
  • Aucune visibilité en cas de problème.

Des modèles abordables comme Netgear GS108Ev3, TP-Link JetStream, ou Ubiquiti UniFi Switch sont parfaitement adaptés aux studios ou plateaux à taille humaine.

Cas concrets de cohabitation réussie

Dans un studio WebTV, on peut par exemple trouver :

  • NDI pour les caméras et le retour plateau.
  • Dante pour l’audio intercom et la console.
  • Art-Net pour les projecteurs LED et effets de scène.
  • CentralControl ou Companion pour automatiser les transitions.

Le tout fonctionne sur le même réseau physique, mais avec des VLANs et une configuration réseau proprement pensée, la cohabitation est stable, évolutive et économique.

Et pour les événements ou les tournées ?

En prestation mobile, il est souvent plus simple d’utiliser un switch 10 Gb/s avec 4 ou 5 VLANs, une console réseau comme Companion/Streamdeck, et de router les flux via des convertisseurs IP (NDI vers SDI ou Art-Net vers DMX XLR). Le tout tient parfois dans un flight case !

Oui, DMX over IP et vidéo sur IP peuvent coexister.
Mais cela n’a rien d’improvisé. Un réseau audiovisuel est un écosystème vivant, dans lequel chaque protocole a ses exigences. Respecter ces règles, c’est garantir la fluidité, la synchronisation… et éviter les mauvaises surprises à l’antenne.


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Gilbert Wayenborgh
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